Le Perchoir 🪶

Être trans en France.



Série de trois billets :

Parce que j'avais beaucoup de choses à dire sur ce sujet qui me tiens tout particulièrement à cœur, le billet original était devenu si large qu'il en était devenu intimidant. Du coup, ne voulant pas perdre ce travail, j'ai décidée de le découpé en trois billets parlant de ce que c'est d'être trans en France :

Paniqué face à la formation du Nouveau Front Populaire, Emmanuel Macron tente de charmés un électorat réactionnaire en balançant les personnes transgenres de France sous un bus, démontrant sa totale incompréhension des revendications militantes.

Être une personne trans, c'est trop souvent être forcément militants malgré nous et devoir faire face seul, souvent avec l'impression d'être contre tous.

Vous êtes ici. ⋅ Un témoignage plus personnel sur ce que c'est que d'être trans en France.

Les trois partagent un contexte : La sorti sur "les changements de sexe en mairie" de Emmanuel Macron, mais les trois billets sont indépendants. La lecture de l'un n'est pas indispensable à la lecture d'un autre.



Je souhaiterais conclure sur quelque chose de plus personnel, moins politique, peut-être plus dans le subjectif et l'émotionnel. Un ressenti global que j'ai de mon existence et des expériences que des gens de la communauté trans que j'ai pu rencontrer m'ont partager. Je veux parler de ce que ça fait d'être trans en France.

Déjà, je peux vous dire que l'administration française est un enfer, ce que vous savez, mais que ça l'est encore plus quand on est trans. Depuis septembre dernier, je me bats pour changer mon prénom et ma mention de genre sur ma carte d'identité, ce qui revient finalement à quelques lettres, mais je n'ai toujours pas fini. Ça a pris des mois, je peux maintenant dire que je m'appelle officiellement Plume et que je suis officiellement et légalement reconnue comme une femme. J'ai réussi sur ça, mais maintenant, il faut que ma mairie de naissance qui est une mairie RN se bouge, ce qu'elle, bien sûr, ne fait pas.

Et après ça, vu qu'elle ne va rien faire, il va falloir que je contacte l'INSEE. Il va falloir que je contacte la CPAM pour tout refaire. Pareil pour les impôts, il faut refaire tout moi-même. C'est un enfer administratif et transphobe. Parce que d'un côté, on se rend compte d'à quel point les services publics ont été détruits. Parce que tout prend mille ans vu à quels points, ça manque d'effectifs. Mais de l'autre, on se rend compte aussi à quel point la transphobie est omniprésente.

Parce que quand on arrive à avoir quelqu'un, bah déjà, ce n'est pas quelqu'un de former sur la question. Donc il faut constamment raconter toute notre vie et le faire de manière un peu dégradante en expliquant ça avec le fameux "je suis un homme, qui est devenu une femme", à des gens qui ne comprennent pas, qui soupirent, qui roulent leurs yeux et qui nous perçoivent donc immédiatement comme étant la personne chiante du jour et qui vont donc essayer de se débarrasser de nous le plus rapidement possible alors qu'on a une demande très simple.

Lorsque l'on fait des démarches en lien avec ça, ça arrive trop souvent à tomber sur quelqu'un qui va nous mentir et nous dire que ce qu'on veut faire n'est pas possible. Et dès qu'on vérifie en ligne, on se rend compte que c'est possible. On se retrouve à assumer si c'est de la transphobie, de la flemme, un manque de connaissances, ou autre. Et au fur et à mesure que l'on entend cette même histoire d'autre gens, on fini par avoir la réponse qu'on ne veut pas avoir.

On tombe aussi sur des gens qui, comme ma mairie de naissance s'amuse à le faire par exemple, ne nous genres jamais au téléphone, jusqu'à ce qu'on leur explique notre situation, de nouveau " homme devient femme, blabla " et là d'un ce coup, c'est "Monsieur" avec un ton méprisant en chaque début ou fin de phrases.

Je ne parlerai pas des tribunaux qui demandent encore des attestations psychiatriques alors qu'ils n'ont pas le droit, qui demande des photos pour vérifier si la personne est bien à leurs normes de ce qu'est une "vrai" femme ou un "vrai" homme et j'en passe. Bonne chance pour les non-binaires, pareille, vous aussi, je ne vous ai pas oubliée, vous exister dans un système qui ne reconnaît simplement pas votre existence alors pour vous, le combat s'arrête avant même d'avoir commencé. Vous devez mentir et détourner ce qui est à notre disposition, composés avec les moyens du bord pour avoir ce qui sera inévitablement un compromis sur votre identité.

Je ne parlerai pas des médecins qui ne sont pas formés et qui ne veulent pas se former sur cette question. Qui donc vont nous renvoyer vers un psychiatre pour avoir une attestation. Psychiatre qui, pour le peu qu'il est plus de 40 ans ne sera pas du tout formé sur la question, et qui donc va tout faire pour nous diagnostiquer et nous foutre sur n'importe quelle médicament pour nous corriger parce que l'idée qu'on soit juste trans, c'est impossible et inimaginable, Non, c'est juste qu'on est borderline, c'est juste qu'on est bipolaire, c'est juste qu'on a des problèmes avec notre père, c'est juste qu'on a des traumas. C'est tout sauf ça. Parce que ça peut être absolument tout sauf le fait qu'on soit juste trans. Ça, ce n'est juste pas concevable pour eux.

Être trans en France, c'est être traité comme un problème, dont tout le monde ce fou. Les médecins s'en foutent de se former parce qu'on n'est pas assez nombreux, du coup, c'est l'enfer d'avoir un traitement hormonal ou une ALD. Le pire, c'est qu'il existe des circuits pour nous, telles que les unités de la SOFECT, les fameuses unité "transgender", aujourd'hui nommé "trans santé" et je vais vous dire un truc : je n'ai pas entendu une seule personne me dire du bien d'eux. Tout ce que j'ai entendu sur eux me glace le sang. Le système mis en place pour nous est absolu pourri jusqu'à la moelle par la transphobie, avec des protocoles erronés, des attentes interminables pour tout, une sur-psychiatrisation constante. Personne ne nous prend au sérieux et quand on croit qu'on nous tend une main ? On se retrouve dans ce genre de traquenards.

À côté de ça, les entreprises pharmaceutiques ne veulent pas faire d'hormones pour nous parce qu'on n'est pas assez rentable du coup, on fait avec les moyens du bord, mais du coup, on vient nous reprocher qu'on n'es pas de traitements spécifiquement pour nous. Les tribunaux et mairies nous disent qu'ils ont mieux à faire et donc nos dossiers ne sont pas prioritaires, donc toutes nos vies sont mise en pause et on est constamment obligée de ce out à tout le monde, médecins, employeur, etc et de s'exposer à des discriminations constantes. Et politiquement, les gens ne veulent pas améliorer nos droits parce qu'on est un sujet trop clivant.

Tout ça, ça crée des boucles infernales qui font que beaucoup de personnes trans restent coincés dans la précarité, qui force beaucoup de femmes trans notamment vers la vente de leurs corps pour survivre. Voilà, ça c'est pour les Jean-Michel PCF, class-first, qui ne parlent que de lutte des classes et qui du coup pensent que lutter pour les droits des trans, c'est pas un vrai combat, c'est une distraction, blabla. Bah si, ça en fait parti. Trouve-toi de meilleures excuses.

Du coup cette sortie de Macron, pour y revenir et conclure sur le sujet, elle ne m'étonne pas du tout, mais elle me révolte plus que les autres. Pas de raisons particulières, c'est juste la goutte d'eau.

Politiquement, on sert à ça. À charmer l'extrême droite. On est fait pour ce rôle, parce qu'on peut dire tout et n'importe quoi sur nous. C'est tellement simple de nous instrumentaliser, on n'est même pas 1 % de la population, on peut dire tout et n'importe quoi sur nous, on peut sortir des livres plein de dingueries et de fake news debunk y a 15 ans et quand même faire le tour des plateaux TV et il n'y aura jamais personne pour contredire parce qu'à la fois tout le monde s'en branle de nos problèmes et en même temps tout le monde s'invente des problèmes avec nous.

Dès qu'on parle d'améliorer nos droits, on a droit à la même réponse : "Il ne faut pas cliver le pays". On est clivant, voilà ce qu'on est, un sujet, un fait divers. Sinon, c'est "y a d'autres priorités" et vu qu'on est moins de 1 %, c'est jamais le moment, c'est jamais la priorité et donc, nos problèmes sont systématiquement ignorés et effacés.

Nous, on est bon pour dire qu'on creuse le trou de la secu ou pour dire qu'on est des prédateurs sexuelles. On alimente les fantasmes complotistes des uns, les fantasmes sexuels des autres (les statistiques de consommation de porno trans sont très édifiantes.). On sert le rôle qu'on nous donne sans avoir le choix, avant de à nouveau retourner faire ce que l'on a toujours voulu faire : essayer de se faufiler dans la masse pour exister en paix, jusqu'à la prochaine fois qu'on se retrouvera sous les projecteurs, craignant de ce que l'on va dire sur nous. C'est ce que je ressens dès que je vois le mot "transgenre" dans les titres d'un média mainstream.

On est tantôt des gens qui sont juste des petits privilégiés qui font chier le monde avec leurs problèmes inventés, tantôt on est des gens qui souffrent et qu'il faut donc traiter de toutes les façons possibles sauf en les aidant à transitionner, ça dépend de la personne est sur le plateau aujourd'hui, dans tous les cas, je sais déjà qu'elle sera là pour nous mettre des balles. On n'est jamais des gens qui souffrent de revendications légitimes, ça, jamais.

Et alors là, depuis que la panique anti-trans a commencé dans le pays, une panique qui était déjà plus ou moins présente dans le fond, mais qui maintenant, depuis l'offensive au sénat et ce bouquin de merde, est pleinement là. Le tout enveloppé dans une atmosphère misogyne, baignant dans un racisme décomplexé et omniprésent, ce pays devient irrespirable. Une pensée et un soutien tout particulier à tous nos adelphes qui subissent les trois en même temps.

Comme je l'ai dit plus haut, pas le choix que de milité, mais je le fais alors que toute ma vie est déjà mise en pauses et aux arrêts complet à cause de ces systèmes pourri. C'est une boucle infernale et j'ai des moments où je ressens que je suis sincèrement épuisée, je sais que des proches s'inquiètent pour moi, je vois comment cela affecte ma vie personnelle, parce que je n'ai pas la place pour ça, mais suis obligée d'en faire. J'ai fait mon coming out le 12 Août 2023, j'attends encore de pouvoir vivre en étant moi-même et de savoir ce que ça fait. J'en ai eu des bribes et c'est absolument merveilleux, je m'accroche à ça, à mes proches et ma communauté trans local pour continuer.

Je sais déjà qu'après la fin de ces nouvelles législatives, si le NFP à une majorité ou au moins, si la droite n'est pas en majorité, je vais avoir besoin de lâcher prise. Parce que je sais qu'il faut réussir à séparer la politique du personnel, mais ça commence à sérieusement me prendre à la gorge.

Comme je le répète depuis le début de ce billet, ouais, je commence un peu à avoir l'habitude. Il y a un pattern historique après tout... c'est pas pour autant qu'on s'y fait.


Merci d'avoir lu.

Force à toutes les personnes transgenres, non-binaires, ainsi qu'aux personnes intersexes de ce pays. On a besoin de la permission de personne pour exister. Si nos vies doivent être un combat, alors on partira en guerre ensembles.

🩵🩷🤍 ⋅ 💛🤍💜🖤 ⋅ 💛💜



Série de trois billets :

Parce que j'avais beaucoup de choses à dire sur ce sujet qui me tiens tout particulièrement à cœur, le billet original était devenu si large qu'il en était devenu intimidant. Du coup, ne voulant pas perdre ce travail, j'ai décidée de le découpé en trois billets parlant de ce que c'est d'être trans en France :

Paniqué face à la formation du Nouveau Front Populaire, Emmanuel Macron tente de charmés un électorat réactionnaire en balançant les personnes transgenres de France sous un bus, démontrant sa totale incompréhension des revendications militantes.

Être une personne trans, c'est trop souvent être forcément militants malgré nous et devoir faire face seul, souvent avec l'impression d'être contre tous.

Vous êtes ici. ⋅ Un témoignage plus personnel sur ce que c'est que d'être trans en France.

Les trois partagent un contexte : La sorti sur "les changements de sexe en mairie" de Emmanuel Macron, mais les trois billets sont indépendants. La lecture de l'un n'est pas indispensable à la lecture d'un autre.



Historique de la publication.

2024-06-23 21:10

2024-06-21 11:42

2024-06-20 21:37

2024-06-19


Ceci devais d'abord être un commentaire à cette publication Instagram vu la veille de ce post. Insatisfaite, je ne l'ai pas postés. Puis, devant cette vidéo de Pasdustream, j'ai décidé de le reprendre et de l'étendre, sauf qu'il est devenu suffisamment large pour justifier une entrée de blog plus qu'un simple commentaire de ce fait, je l'ai encore plus étendu.

Arriver à un certain point, ce post à failli être divisés en trois. La partie 1. Et les deux sous-parti de la partie 2 aurai était leurs propres billets. J'ai finalement eu l'idée de divisés le billet en deux parti distinctes sur la même page.

MISE À JOUR, 23 JUIN, 21:10 : Finalement, ce post à bien était divisés en trois.

Je vous présente mes excuses pour le manque de détail dans cet historique. Ce billet de blog à occupé toute ma vie pendant les deux derniers jours. J'ai juste envie de le postés et de prendre une pause.

#politique #transidentité